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Le cycle de Pâques

 

 

Le dimanche des Rameaux :

Selon les Evangiles, le Christ se dirigeant vers Jérusalem, fut accueilli par une foule nombreuse portant des branches de palmiers en criant « Hosanna ». Puis Jésus se rendit au Temple d’où il chassa les marchands.

Depuis le 8ème siècle, de ces textes découle la liturgie de la bénédiction des Rameaux, la procession avec fermeture et réouverture des portes de l’église, et le nom d’ »Hosanna » donné parfois au dimanche des Rameaux.

Le nom « rameau » s’applique à diverses espèces de branchages : sapin, laurier, saule et buis de nos régions. Ces « rameaux verts », bénis, étaient suspendus dans la maison de façon très apparente. On les utilisait comme aspersoirs pour jeter de l’eau bénite en cas d’orage ou l’administration du sacrement aux malades. Souvent les défunts emportaient dans leur cercueil un rameau « pour s’en servir à l’autel de Dieu.

On suspendait des friandises dans les rameaux à bénir des enfants. Cette pratique était très fréquente dans l’Yonne et le Nivernais, et persistait encore jusqu’à la seconde guerre mondiale. La tradition de déposer des buis bénis sur les tombes, le jour des Rameaux, était diversement suivie. Très populaire dans le Nivernais (elle persiste encore à Clamecy), cette coutume était très rare en Bourgogne.

 

La Semaine Sainte :

Si le dimanche des Rameaux était à la fois folklorique et liturgique, les Jeudis,, Vendredis et Samedis Saints et le dimanche de Pâques forment surtout des rituels chrétiens.

On ne sait pas de quand date l’interdiction de sonner les cloches entre le Jeudi et le Samedi Saints, commémorant le temps qui s’écoule entre la mort du Christ et sa Résurrection. Les cloches se rendent à Rome pour rendre visite au Pape et chercher des œufs qu’elles laisseront tomber au retour dans les jardins pour les enfants sages. Le plus souvent, elles « s’envolent », mais dans certains villages nivernais, elles «  voyagent sur un char fleuri ».        

Pendant la période dite des « ténèbres », elles sont remplacées par des instuments : claquoirs, castagnettes etc. Dans nos régions, on employait des « crécelles », dites « cliquettes » en Côte d’Or, « cralottes » dans l’Yonne ou « tartvelle » dans le Morvan.

Le samedi Saint, ont lieu un certain nombre de bénédictions : eau , pain et maisons.

A Nevers, durant tout le 19ème siècle, le lundi de Pâques, une procession se formait avec le clergé en tête, qui bénissait la Loire afin d’empêcher les « grandes eaux ».

 

Quêtes et chansons de Pâques

Des quêtes alimentaires faites par les mendiants, la jeunesse masculine ou les enfants de chœur étaient largement répandues en France durant la Semaine Sainte, et très suivie en Bourgogne, Morvan et Nivernais. Dès le 16ème siècle, les mendiants avaient adopté une complainte de quête, « la Passion de Jésus-Christ » rappelant tous les supplices qu’il avait subis.

« La Passion du Christ - Qu’elle est triste et dolente – Ecoutez-là, petits et grands – S’il vous plait de l’entendre – Vous verrez son côté percé – Par un grand coup de lance – Vous verrez son sang découlé – Tout le long de ses membres – Qui le vendredi la dira – Aura sa récompense – Et celui qui l’écoutera – Aura des indulgences. »

 

En Bourgogne, les enfants de chœur quêtaient dans de nombreuses localités les dons d’œufs

dits « roulées ». Ils chantaient « la Passion de Jésus-christ » et terminaient par l’invocation « O crux ave, spes unica » ; ou encore ils psalmodiaient l’ »Alleluia » sur l’air de « O filii, o filiae » : « N’oubliez pas les enfants de chœur – Qui chant’t les louanges du Seigneur – Un jour viendra, Dieu vous l’rendra – Alleluia ».

Les « roulées » ou « routlées » étaient répandues en Nivernais. A Luzy et alentours, la « roulée » avait un sens particulier. C’était de cadeau d’œufs aux propriétaires par leurs fermiers ou métayers.

Dans l’Yonne, indépendamment des enfants de chœur, différentes catégories professionnelles avaient l’habitude de recevoir des œufs teints : facteurs ruraux, cordonniers, forgerons, et même dans l’Auxerrois et dans l’Avallonnais, les instituteurs envoyaient chercher leurs « roulées » par les enfants.

 

Les œufs de Pâques :

Les œufs dits de Pâques étaient jadis, le cadeau obligatoire offert par les parrains et marraines à leurs filleuls et filleules. La coutume des œufs de Pâques se rattache à l’établissement du Carême. Dès le 4ème siècle, l’Eglise interdit la consommation d’œufs pendant la pénitence des quarante jours, alors rigoureusement observée. Une grande quantité d’œufs se trouvant entassées dans les provisions du ménage, le moyen le plus rapide pour s’en débarrasser était de les donner aux enfants. On en fit même l’objet d’un cadeau amusant en les teignant ou en les entourant de figurines et de devises. En Bourgogne et en Nivernais, ces œufs teints sont appelés « roulées » (à ne pas confondre avec ceux quêtés, « baricolés », « brignolés » ou « bardots ». A Chitry les Mines, d’après le « Journal » de Jules Renard, ces œufs teints en jaune ou en bleu étaient ornementés de dessins faits à la bougie.

Les œufs pondus le Vendredi Saint étaient plus ou moins bénéfiques. En règle générale, pour bien se porter et éviter les maladies et les maléfices, il convenait de les manger que le dimanche de Pâques, où ils préservaient de tous les maux. Pendus au dessus de la porte ou à l’intérieur des étables et des écuries, ils écartaient tous les mauvais sorts. Ils permettaient d’arrêter les incendies si on les jetait dans le brasier.

Dans nos régions, ils avaient une relation magique avec la fécondation et la reproduction : mettre un œuf du Vendredi Saint parmi d’autres, assurait une bonne réussite de la couvée.

Par contre, dans le Morvan, « les œufs du Vendredi Saint » sont marqués avec du charbon, et comme ils ont naturellement bénis, on ne les met jamais sous la couveuse.

 

Jeux et divertissements :

Comme toutes les périodes de fêtes, celles de Pâques se caractérise par un certain nombre de jeux qui s’exécutaient au moyen d’œufs.

 

-         La « toquette » était en faveur dans la région de Tannay (Nièvre) et dans l’Yonne sous le nom de « Roquette ». Chaque joueur tenait serré et bien caché dans sa main, un œuf dur, teinté ou non, et le « toquait » contre celui de son partenaire ; celui dont la coquille ne se cassait pas gagnait l’autre. Dans la pratique, il y avait de nombreuses manières de tenir l’œuf et de le frapper : avec le gros ou le petit bout, en sélectionnant un œuf à la coquille plus dure etc.

-         La « roulée » (ou « roulette » en Bourgogne, Morvan ou Nivernais) consistait à faire rouler un œuf sur un plan incliné. Tout œuf touché par celui du joueur devenait sa propriété. Il existait plusieurs astuces : bien savoir de quel côté on devait placer le gros ou le petit bout pour aller à droite ou à gauche afin d’heurter celui que l’on voulait atteindre…A quelle hauteur devait-on le placer sur la planchette pour aller plus ou moins loin ; ou encore le positionner ‘cul sur tête » pour qu’il roule droit au but ! La roulée terminée, l’œuf était écalé, coupé en tranche et mangé avec la fameuse salade de pissenlit à l’huile de faîne (gland de hêtre) si populaire dans nos régions. Ce sont peut – être les Morvandiaux qui ont apporté ce jeu à Paris dans les années 30, où une joute avait lieu tous les ans, avenue Parmentier, non loin de la rue du Morvan et de la rue Saint Maur, bien connues des lecteurs du « Morvandiau de Paris ».

 

Ainsi se termine le cycle de Pâques dont les rites ne permettent aucun rattachement aux fêtes du printemps gréco-romains, contrairement au cycle suivant, celui de Mai.


© 2005 par Annie Delaitre-Rélu
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