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Le Cycle des Douze Jours

 

Ce cycle est de durée variable suivant les régions : de la Sainte Catherine aux Rois ; de Noël au jour de l’An ; de la Saint André aux Rois. Comme ce noël ancien : « Par douze jours, j’en ai fait un complet Noël nouvelet. Noël chantons icy ».

 

Les noms donnés à Noël sont différents dans les provinces françaises ; en Côte d’Or, en Bourgogne : Noeï ; dans le Morvan : Noé.

 

En Bourgogne, on constate une préférence très nette pour le jour de l’An, où la tournée des enfants par groupes allaient chercher leur « guilanneuf » (ou étrennes), appelé ainsi dans le dernier quart du 19èmesiècle. Ils chantaient des « chansons de quêtes » telles : « C’est aujourd’hui, veille de l’An – Que Dieu vous donne un bon an – Toute l’année, heureuse année – Que Dieu bénisse la maison – les poutres et aussi les chevrons – Toute l’année – Bonne année. »

 

Dans le Nivernais, peu ou pas de chansons de quêtes.

 

-Le Père Janvier ou « le Janvier » : la croyance en ce distributeur d’étrennes était répandue dans ces trois régions ; chez ma grand’mère paternelle, il n’y avait pas de Père Noël, mais le Père Janvier et son sinistre compère, le Père Fouettard

 

-La vieille et la nouvelle année : mon grand père maternel me racontait cette légende : La nouvelle année apparaissait le 1er Janvier dans une superbe robe à traîne. Chaque jour, un petit bout était déchiré. Et le 365ème jour, la malheureuse était presque nue et en haillons… Au 12ème coup de minuit, la nouvelle année apparaissait resplendissante et précipitait la vieille dans un puits sans fond. Je n’ai jamais trouvé traces de ce conte dans les livres ; mais à la grande joie de mon « Pépé », je faisais de nombreux dessins de la scène du puits.

 

-Pas de brandons, ni de bûches traditionnels en nivernais

 

-La bûche de Noël : En 1887, le folkloriste bourguignon Feurtiault se demande : « Y a-t-il un foyer dans les villages de France où n’ait pas sa bûche ? » La réponse est non. Seul le temps pendant lequel elle devait durer différait suivant les endroits. Dans l’Yonne, elle devait brûler toute la nuit de Noël, car la Vierge pouvait venir changer l’Enfant Jésus et faire chauffer sa bouillie… Cette bûche portait de nombreux noms dialectaux. Celui de la bûche icaunaise ne nous est pas parvenue. Par contre, en Côte d’Or, elle était appelée « suche » à Dijon ; le feu y était mis la veille de Noël. Le père de famille avec sa femme et ses enfants chantait des noêls. Puis il demandait aux enfants d’aller prier Dieu dans quelque recoin pour que la « suche pisse des bonbons ». Pendant ce temps, on mettait à chaque bout de la bûche, des petits paquets de friandises que les enfants recueillaient, croyant que la « suche les avait pissés. » Chez les vignerons, la bûche « pissait » des pruneaux et des marrons.

 

Dans le Morvan, la bûche appelée « cheuche » devait brûler jusqu’au premier jour de l’année. Il fallait donc trouver chaque matin dans l’âtre quelques tisons incandescents pouvant raviver le feu. Si elle était complètement éteinte, c’était un présage de mauvais augure.

 

A la veillée de la messe de minuit, l’aïeul ou le père tisonnait la bûche pour lui faire faire le plus possible d’étincelles en disant : « Evéyé, Evéyé, Eveyons – Autant de gerbes que de gerbaillons. » Car plus la bûche donnait des étincelles, plus on récolterait de gerbes.

 

En Saône et Loire, la « souche » était parfois baptisée avec du vin blanc, tandis que la famille se signait. Dans cette même région, la bûche était « gardée » pendant la messe de minuit par un homme armé d’un fusil ou d’un pistolet. Etait-ce par crainte des voleurs ou pour éloigner les sorcières et leurs maléfices ?

 

Dans le Morvan, la bûche avait de nombreuses appellations ; les plus fréquentes : « zuche » - « cesson » ou « coque ». Considérée comme porte-bonheur, elle devait brûler différemment suivant les localisations : toute la nuit de Noël, toute la semaine de Noël au premier janvier, ou durer pendant les « trois fêtes », c'est-à-dire jusqu’aux Rois.

 

Pratiques alimentaires

 

-Le « pain de Noël », (comme celui de Pâques), était en général dans toute la France, plus blanc que le pain de ménage quotidien. En Bourgogne, c’était le pain blanc de froment appelé 

« foisse » ou « fouace ». Il avait suivant les régions, des vertus protectrices contre la foudre, les inondations, ou thérapeutiques, guérissant la rage, prévenant des chutes accidentelles etc.

 

-Le « réveillon » : dans la majeure partie de la France, le soir du 24 décembre, on ne mangeait que légèrement, ou pas du tout, si l’on avait l’intention de communier à la messe de minuit. Au retour de cet office, on faisait un repas substantiel et joyeux : le réveillon. En Bourgogne, on pratiquait le « réveillon maigre » en faisant des crêpes, arrosées de vin blanc chauffé dans un pichet en terre. En Nivernais, la « bouillie au grain », lait mélangé à du blé mal cuit, fort indigeste, avait un caractère magique.

 

-Les « gâteaux de Noël » étaient offerts par les parrain et marraine à leur filleul pour cette fête, ou comme étrennes au premier janvier. En Bourgogne, c’étaient des « gâteaux à pointes » appelés « quignô » ou « quaignô » ou « coqueu » ou « foconnes ». En Nivernais, les « apognes cornues » étaient fabriquées avec des rognures de pâte et réservés aux enfants. La puissance des pointes contre les maléfices et les sorciers est-elle à l’origine de ces formes ?

 

Les Rites

 

-Les Noëls : chants de circonstance, ils ont religieux et populaires, les paroles étant souvent « collées »sur un air connu. Les folkloristes les groupent en « noëls lyriques », « énumératifs », et « géographiques ».

Dans les « noëls lyriques », figurent le célèbre « Il est né le divin enfant », « le Noël d’Adam, Minuit chrétien » dont l’histoire est curieuse. Placide Cappeau, en 1847, « écrit un noël pour une cantatrice, Madame Laurey. Cette dernière obtient de son ami, le compositeur Adam, bien connu pour ses idées anticléricales, la mélodie ; et l’on chante ce « Minuit Chrétien » à Roquemaure pour la première fois au Noël 1847.

 

Souvent critiqué, (chanson à boire, flonflons d’opérettes) il est adopté par les églises parisiennes et les organistes le joueront pendant plus d’un siècle ! Un autre noël lyrique très apprécié : « Trois anges sont venus ce soir, m’apporter de bien belles choses ». Composé par Augusta Holmès (1847 -1903) qui travaillait pour le théâtre ; on lui doit de nombreuses mélodies dont elle composait vers et musique.

 

Les noëls énumératifs : sans doute les plus populaires, évoquent la succession de cadeaux offerts à l’Enfant Jésus.

 

Les noëls géographiques : selon Achille Millien, copiés sur « les Bourgeois de Châtre (Arpageon), on faisait défiler devant la crèche, une longue énumération de tous les hameaux d’une paroisse ou tous les villages d’une « élection ». D’un intérêt médiocre, ils étaient cependant appréciés, car les fidèles annexaient le miracle de Noël à leur région et à leur ville.

 

- Les crèches : il semblerait que la plus ancienne figuration de la Nativité est un fragment de sarcophage romain daté de 343, sur lequel sont représentés l’adoration des bergers au clair de lune, l’âne et le bœuf… Des sortes de crèches apparurent sous forme de drames liturgiques de Noël dès le 12ème siècle. Au 13ème siècle, Saint François d’Assise popularise les mystères de Noël.

 

Les crèches d’églises remontent au 17ème siècle en Alsace. Une tradition respectée dans toutes les églises, même les plus petites et les plus pauvres. Certaines sont des vrais chefs d’œuvres.

Les crèches familiales : leurs débuts sont incertains, probablement fin du 18ème siècle. En ce qui concerne le Nivernais (région de Pouilly/Loire), on faisait la crèche huit jours avant Noël, et on la défaisait le jour de la Saint Vincent célébrée par les vignerons.

Les crèches spectacles ne semblent pas avoir eu cours en Bourgogne, Morvan et Nivernais.

 

Pratiques concernant les animaux

 

- Nettoyage des étables en Bourgogne ; mais pas de réveillon pour les bêtes. Dans le sud de la Nièvre, on mettait dans l’eau des abreuvoirs, de la suie provenant de la combustion de la bûche.

 

- L’offrande de l’agneau et l’adoration des bergers se pratiquaient dans l’Yonne. Parfois, les bergers étaient accompagnés de leurs chiens tenus en laisse qu’ils faisaient aboyer. De même, on pinçait l’oreille de l’agneau pour le faite bêler… Il était béni.

 

Jeux et divertissements

 

- Souffler le charbon : jeu pratiqué dans l’Yonne et la Côte d’Or pendant la veillée de Noël, qui consistait à détacher un tison enflammé de la bûche et le suspendre par un fil dans la pièce du réveillon. Deux personnes à genoux, les mains derrière le dos, soufflaient le charbon à tour de rôle ; c’était un duel à outrance, jusqu’à ce que l’un d’entre eux manque de souffle pour continuer le match.

 

- Jeu des noix : Pratiqué en Côte d’Or, on posait une planche inclinée, appuyée au dossier d’une chaise et au sol à l’autre extrémité. Chacun faisait rouler des noix sur cette planche, de façon à toucher d’autres noix rangées par terre en ligne devant la planche ; les noix touchées appartenaient à celui qui les avait fait sortir de leur ligne.

- Farces de Noël : pratiquées en Côte d’Or, les « chamorrages », vraisemblablement des « barris » ; la jeunesse ramassait tout ce qui traînait : voitures, brouettes, traîneaux , et allait les cacher pour les faire chercher par leur propriétaire.

 

Les merveilles de la nuit de Noël

 

-         Les animaux « parlants » pendant la messe de minuit ; dialogues entre le bœuf et l’âne et punition du curieux qui avait essayer de les écouter. (Souvent mort de l’indiscret).

-         La chasse du Roi Hérode : le massacre des Innocents qu’il ordonna lui vaut comme pénitence de errer du monde à l’autre. En Bourgogne, des personnes attardées dans la nuit du 5 au 6 janvier, ont vu et entendu au-dessus de leurs têtes, un cortège effrayant de chasseurs passant en trombe avec cris, jurons, aboiements de chiens, galopades de chevaux, conduit par le roi Hérode.

Egalement le thème du « Chasseur des Avents » ou du « Chasseur Puni ». Il s’agit d’un chasseur qui quitte la messe de minuit pour suivre son chien qui donnait la chasse au cerf. Conduit par le démon, il se précipite dans le vide et est condamner à chasser pour l’éternité.

-         Les « pierres qui virent », les trésors : la nuit de Noël, des roches se déplacent et

      laissent entrevoir des trésors.

-         La légende de « La Pierre qui Vire » dans l’Yonne : « Une femme, descendue dans un souterrain pour ramasser de l’or, oublie son enfant. La Pierre qui Vire referme le gouffre sur l’innocent. Tous les jours, la mère offre du lait à la pierre fée, qui en nourrit l’enfant ; si bien que la mère le retrouve vivant dans la nuit du Noël suivant.

            Depuis que l’enfant a été retrouvé, la Pierre ne tourne plus…

-         Dans l’Yonne également, pendant la lecture de l’Evangile de minuit, apparaissent un   

       gâteau, une bouteille de vin et un plat d’argent destiné à recevoir des offrandes, en     

             particulier à Aillant sur Tholon et La Ferté Loupière.

-         Toujours dans l’Yonne, à Villemanoche, la « Pierre de Minuit » va se désaltérer dans la rivière Yonne.            

 

Pratiques magiques

 

Dans la Nièvre, le gui est suspendu au plafond, et celui qui passe en dessous sans le faire exprès, aura de la chance dans l’année. Ce bouquet est enlevé aux Rameaux et on le brûle.

 

Les fêtes des Rats

 

Fêtées en Bourgogne le 29 décembre, jour de la Saint Thomas de Canterbury, où il ne fallait ni travailler, ni aller au grenier, car le blé aurait été dévoré par les rongeurs.

 

Les dictons et les présages

 

« Noël au balcon, Pâques aux tisons » : un temps froid à Noël est normal ; un temps doux ne l’est pas et présage un temps froid à Pâques.

 

En Bourgogne, le chat sert de baromètre : le nombre de fois qu’il passera sa patte sur son oreille donnera le nombre jours de mauvais temps, neige ou froid. Idem pour l’annonce d’une pluie proche…

 

Présages des douze jours

 

Selon une croyance répandue dans toute l’Europe, le temps de Noël et des 11 jours qui le suivent annonce le temps qui dominera dans chacun des 12 prochains mois. Ces croyances prouvent le besoin qu’avait le peuple français essentiellement rural de savoir le temps qu’il fera dans l’année à venir ; d’où le caractère magique attribué aux 12 jours. Nombreux présages météorologiques annoncent richesse, pauvreté et même paix et cataclysmes. D’où quelques dictons populaires

 

En Bourgogne : «Clair Noël, claires javelles » ; et en Nivernais : « S’il fait clair dans les granges, elles resteront clair », ce qui signifie qu’une nuit de Noël claire est de mauvaise augure pour les récoltes.

 

Autre croyance populaire : c’est durant la nuit de la Nativité que se forment les germes des plantes. Si elle est noire, ils « se pelotonnent les uns contre les autres, car ils ont peur ! » ; d’où la naissance de nombreux fruits. La nuit noire est propice au blé et aux noix en Bourgogne.

 

Les interdictions

 

En Bourgogne :

 

-         interdiction de travailler le jour des Saints Innocents : « Prends bien garde aux Innocents / Ce jour-là ton travail laisse / Prends ton cierge et ouïs la messe / Pour bien finir l’an présent. »

-         interdiction de faire la lessive : les laveuses qui enfreindraient cette loi risquent d’être griffées par les sorcières ou battues à coups de battoir.

-         interdiction de filer ou de coudre, sinon cela porterait malheur aux enfants, ou les animaux s’étrangleraient.

-         interdiction de cuire le pain entre Noël et les Rois, car le pain moisirait et les bêtes boiteraient.

-         interdictions alimentaires : le cycle des douze jours n’était pas une période de pénitence. Le samedi était « jour maigre » pour beaucoup de diocèses français, mais pas en Bourgogne. Par contre, certains aliments étaient proscrits : en Saône et Loire, les femmes s’abstenaient de manger de la viande les jours de Noël et des Rois pour se préserver de certaines maladies de leur sexe… Dans certaines régions, il fallait éviter de manger des prunes pour prévenir les ulcères. Dans l’Yonne, entre Noël et le jour de l’An, on devait se priver de pommes sous peine d’avoir des furoncles…En dehors de cela, les « tabous » étaient nombreux et souvent contradictoires suivant les provinces. En Bourgogne, on se gardait bien d’enlever le fumier des étables car le bétail boiterait, ou dans la vallée de la Nièvre et Nevers, il pourrait avoir la cocotte…

 

Les fêtes de fin d’année

 

Entre Noël et la Saint Sylvestre, étaient fêtés Saint Etienne, Saint l’évangéliste, et Sainte Colombe de Sens, morte dans cette ville, vierge et martyre sons les persécutions de Valériens (257-258 après J.C.). Une chapelle située près de Sens lui était dédiée et était un lieu de pélèrinage le 31 décembre ; une procession de fidèles s’y réunissait, portant des tableaux et gravures la représentant. 

 

Mais la fête la plus importante dans nos régions était celle des Innocents, un peu licencieuse car une survivance des Saturnales romaines, où étaient suspendues les hiérarchies établies, avec parfois un aspect érotique qui n’avait rien d’innocent.

 

En Bourgogne, elle était souvent associée à la fête des Fous. A Beaune et dans ses environs, on fouettait (ou l’on faisait le simulacre) les petits enfants pour rappeler le massacre des premiers nés d’Israël tués sur ordre du roi Hérode ; cette fessée donnait droit au « pier-fou », gâteau confectionné par les mères de famille : un morceau de pâte de 30 à 40 cm représentant un roi mage, les corps, bras et pieds étant dessinés avec la pointe d’un couteau

 

A Châlons-sur Saône, les enfants vêtus de couleurs bariolées, armés d’un mousquet, d’une dague ou d’une épée faisaient « le royaume », c'est-à-dire qu’ils se réunissaient en conseil et élisaient un roi. Cette royauté éphémère se terminait avec Carnaval. Pour être élu, il fallait être de Châlon et âgé de moins de quinze ans.

 

D’après les registres paroissiaux de plusieurs églises de Dijon, une farce se jouait sur les parvis, suivie d’un défilé en ville avec fifres et tambours. Dans toutes les communautés religieuses ayant des écoles, on travestissait les enfants en moines ou en religieuses ; et parfois, celles-ci changeaient d’habits avec leurs pensionnaires et leur obéissaient pendant les trois jours que durait la fête des Innocents.

 

Beaucoup moins « innocente », la fête des Fous souvent célébrée à la même date. On assistait à une parodie de la liturgie et à des processions ridicules faites dans les églises : on y gesticulait, dansait et brandissait des chapelets de saucisses… Au Moyen-âge, le duc de Clèves avait créé à Dijon la « société des Fous », puis la « compagnie de la Mère Folle » regroupant cinq cents personnes : ecclésiastiques, nobles, juges, bourgeois et marchands. Cette assemblée avait un but moral : s’il survenait dans la ville un meurtre, un mariage douteux ou quelque événement insolite, le « chariot de la Mère Folle » adressait aux coupables un discours satirique qui, parfois, les incitait à renoncer à une mauvaise action.

 

Le « Gaillardou » ou « Mère Folle » de Châlon-sur-Saône jouait le même rôle. Ces sortes de « Charivari » et les désordres qui s’en suivaient, entraînèrent leur suppression au milieu du 17ème siècle.

    

La « fête de l’Ane » serait née à la suite d’un sermon de Saint Augustin ayant vanté les mérites de l’âne qui avait été le « compagnon »  du Sauveur sur les routes d’Egypte jusqu’à Jérusalem aux Rameaux. Au départ, le clergé se prêta à ces manifestations qui dégénérèrent.

 

A Autun, l’âne était souvent recouvert d’un drap d’or dont les quatre coins étaient tenus par des chanoines.

 

A Sens, on la célébrait le jour de la Circoncision. Une jeune fille entrait dans l’église, montée sur un âne, tenant un enfant dans les bras et conduite par un vieillard personnifiant Saint Joseph. Pendant la messe, on chantait une prose rimée, ponctuée à chaque strophe des « hi-hans » des participants. Le célébrant, au lieu de « l’Ite missa est » se mettait à braire de toutes ses forces et les fidèles répondaient « hi-han »…

 

Le Jour de l’An

 

La date officielle du commencement de l’année a varié au cours des siècles : 1er mars pour les Mérovingiens, Noël pour les Carolingiens ; et même des variations suivant les provinces, telles la Bourgogne qui, durant tout le Moyen-âge, préludait l’année soit le 25 mars ou le 25 décembre. Notons qu’à la même époque à Paris, l’an nouveau commençait le Samedi Saint après la bénédiction du cierge pascal.

 

-         les quêtes ou « étrennes » : le début de l’année donnait lieu à des « rites de la première    

      fois », qui s’accompagnaient de chansons dont les premiers mots étaient

            « aguilaneuf ». Dans l’Yonne, ils prenaient différentes formes : « griaulée »,        

            « guyonnet », « gorgeulé » etc. Rien ne prouve que ces formes dialectales dérivent du

            primitif « au gui l’an neuf ». L’origine peut être issue du mot celte « égui-nane » qui

            signifie « étrenne ».

-         Les gâteaux : la plupart du temps, ce sont des petits pains ; mais l’on fait aussi des crêpes, des gaufres ou des gâteaux en pâte feuilletée.

-         Les réunions de famille autour d’un grand repas sont une coutume bien ancrée dans la

      Nièvre.

-         Les chansons : dans de nombreuse régions de France avait cours une chanson de    

            caractère énumératif et récapitulatif genre scie où étaient dénombrés tous les cadeaux

            que le fiancé ou le mari devait faire à celle qu’il aimait chaque mois de l’année.

 

      Il s’agit de « la Perdriole.

« Le premier mois de l’année que donn’rais-je à ma mie ?(bis) Une perdriole / Que va, que vient, que vole /Une perdriole, que vole dans le bois…Le deuxième mois de l’année / que donn’rais je à ma mie (bis) Deux tourterelles, une perdriole etc. Le troisième mois de l’année/ Que donn’rais je à ma mie (bis) Trois ramiers aux bois, deux tourterelles, une perdriole etc….Le douzième mois de l’année / Que donn’rais je à ma mie (bis) Douze biaux garçons, gentils et bons / onze demoiselles gracieuses et belles / Dix coqs chantant/ Neuf poules pondant / Huit moutons blancs / Sept chiens courants /Six lièvres aux champs / Cinq lapins grattant la terre / Quat’canards volant en l’air / Trois ramiers au bois / Deux tourterelles / Une perdriole que va, que vient, que vole / Une perdriole que vole dans le bois. AH….

 

-         Les cadeaux ou étrennes : les enfants mettaient leurs sabots dans la cheminée afin que le Père Janvier y dépose les présents destinés aux enfants sages dans la nuit. Lors de leurs quêtes, ils recevaient soit de l’argent, soit des friandises, souvent des noix, des pommes ou des « daguelles » ou poires confites.

 

-         Les visites : elles étaient de rigueur le premier jour de l’année ; et en Bourgogne, elles avaient une importance sociale, l’omission d’une visite à un membre de la famille ou à un ami entraînant certaines rancoeurs. La coutume voulait que l’on offre la  « goutte » aux visiteurs.

 

-         Les rencontres : le matin du Nouvel An, il était de bon augure de rencontrer en premier, pour un homme, une femme ; et pour une femme, un homme. Par contre dans le Nivernais, le fait de recevoir la visite d’une femme en premier était signe de malheur. Mais on pouvait conjurer ce mauvais sort, si un homme franchissait le premier le seuil de la maison ; d’où la coutume de prendre rendez vous la veille avec un voisin et de n’ouvrir qu’au signal convenu !                                                                           

                                                                                                                                                                     

-         La « première eau » : c’est également au premier janvier que se rapportaient les  

      traditions concernant la « première eau » ou « crème de l’eau » au pouvoir magique.

      D’après Achille Millien, elle était appelée « eau neuve » dans plusieurs bourgs du

      Nivernais ; mais il ne donne aucune indication sur les bienfaits qu’elle pouvait

      procurer. Sans doute un signe de prospérité

 

Les Rois

 

La fête des Rois fixée au 6 janvier est d’origine religieuse, d’après l’évangile de Mathieu, qui, seul, rapporte brièvement l’épisode des Mages venus adorer l’Enfant Jésus. Il n’existait pas de liturgie folklorisée dans nos régions. Par contre, on pratiquait la coutume du « Roi de la Fève », transposition des Saturnales romaines, où maîtres et esclaves, riches ou pauvres, vivaient confondus sous l’autorité d’un roi élu par le sort à qui tous obéissaient.

La « galette » était répandue dans toute la France. Mais en Bourgogne, c’était un gâteau en forme de couronne.


« Tirer les Rois » était une tradition populaire : un enfant, les yeux bandés, désignait en premier la « part du Bon Dieu », celle de « la Sainte Vierge », puis celle de la personne âgée etc.


Dans les chaumières morvandelles, on se bornait à confectionner un gâteau de sarrazin ou de froment cuit sous la cendre avec une noisette en guise de fève. Dans certains villages, on mettait deux amandes dans le gâteau. Si un jeune homme trouvait un de ces fruits, et une jeune fille l’autre, le roi et la reine s’embrassaient et esquissaient quelques pas de danse.

 

Les pratiques magiques liées au culte des Mages

 

L’orient d’où venaient les Mages faisait rêver ; et on les pensait porteurs de secrets. Aussi les invoquait-on pour prévoir le temps, se protéger des maladies et leur demander joies et bonheur.


Un « procédé de divination du jour des Rois » consistait à faire « tourner les buis ». Il était très pratiqué en Bourgogne et Morvan  par les filles désirant se marier et sur leurs chances de bonheur. Les feuilles de buis devaient être cueillies avant le chant du coq. Elles étaient posées sur la plaque horizontale du foyer, la face supérieure placée dessous, et l’on formulait la question. La chaleur faisait boursoufler les feuilles ; si elles se mettaient à tournoyer, la réponse était favorable ; par  contre, si les feuilles restaient immobiles et noircissaient, ce signe était très défavorable.

Une autre pratique était courante en Nivernais pour les jeunes filles en quête de mari. Le jour des Rois, il fallait mettre du plomb fondu sur des brins de paille disposés sur une écuelle pleine d’eau. En examinant les petits morceaux tombés au fond du récipient, les filles trouvaient les outils spécifiques au métier de leur futur…Le « pronostic des grains de blé » permettait de connaître le prix qu’atteindraient les récoltes en cours d’année.


En Bourgogne, le jour des Rois (et la huitaine qui suivait) avant le souper, on mettait douze grains de blé sur des charbons ardents. Le premier grain était appelé janvier ; sous la chaleur, le grain sautait : s’il le faisait en avant, le prix du blé augmenterait pendant ce mois ; s’il sautait sen arrière, une baisse était à prévoir…Et l’on opérait ainsi pour chaque mois.                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                       


© 2005 par Annie Delaitre-Rélu
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