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Île Margot, Margotins et Margotats

 

 

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adis, l’Île Margot était entourée par le cours principal de la rivière Yonne, et par son bras dit « de la Gravière » qui longeait à partir de la place des Jeux les enceintes de la ville haute, en suivant le parcours où seront plus tard établis le canal du Nivernais et l’Avenue de la République. Il rejoignait le Beuvron un peu au dessus de l’endroit où sera construit le pont de l’Abattoir (cf. le plan de Clamecy d’Amédée Julien dans le bulletin n° 3 de la Rouette Couplière). Le prieuré de Reigny, près de Vermenton, possédait depuis 1367 une maison dite de « Montaulbéry » que les moines avaient acquise moyennant la somme de 85 florins. Elle était située aux environs de l’actuel  magasin de la faïencerie d’art Colas.

 

D’après Marlière, il existait à Clamecy en 1498 un notaire du nom de Margault, qui était propriétaire de cette île et lui avait donné son nom. Dans une déclaration des droits du Duc de Nevers au 15 mars 1612, on trouve : « A Monseigneur, appartient la rivière Yonne, appelée Chastillon, depuis le vieux port estant au dessous du pont de Bethléem jusqu’au pertuis de la Forêt ».


Il semblerait donc que Clamecy était doté d’un port assez ancien, dont le seul emplacement vraisemblable était la partie basse de l’île en amont de la rivière Yonne. Son importance semble avoir été grande, puisque de lui subsisteraient deux vocables caractéristiques du parler des mariniers de l’Yonne et de la Seine : les margotats et les margotins.

 

Le terme margotat désignait des bateaux à fond plat, non ponté et à faible tirant d’eau, ancêtres de nos chalands du 20e siècle, qui naviguaient sur l’Yonne avant l’établissement du Canal du Nivernais et amenaient à Paris le bois de chauffage jusqu’à la création du flottage par trains de bois.

 

Le premier « train de bois à brûler » n’ayant atteint la capitale que le 21 avril 1547, on peut supposer que le bois des forêts morvandelles descendaient vers la Seine par l’Yonne, chargé sur ces « margotats » dont le port d’attache était « l’Île Margot ».

 

L’hypothèse que m’a léguée mon grand-père était la suivante : l’Île Margot était d’un accès relativement facile pour les bois venant des forêts avoisinantes :  Sembert et Armes. Pour les bois du Marché, ils devaient emprunter le Crôt-Pinçon qui n’était qu’un mauvaise chemin creux, et traverser toute la ville haute depuis la Porte du Marché jusqu’à celle de Bethléem, à l’issue de la Porte Châtelaine.  Ces accès difficiles et ces transports limités étaient onéreux, car la région desservie se limitait à quelques kilomètres autour de Clamecy. Il est très vraisemblable que l’approvisionnement du « Vieux Port » a été assuré par des flottages à bûches perdues beaucoup plus tôt que ne semblent l’indiquer les lettres patentes délivrées à ceux que l’on désigne à tort comme les « inventeurs du flottage », et qui ne furent que les organisateurs des premières associations de flottage.

 

La situation de l’île Margot au confluent de l’Yonne et du Beuvron en fit le premier port clamecycois, parce qu’il pouvait être facilement et abondamment desservi par ces deux cours d’eau flottables à bûches perdues, et qui, de plus, aboutissait au premier bief de l’Yonne pouvant porter bateau.





 

Le nom de margotins donnés aux petits fagots d’allumage viendrait de leur fabrication artisanale inventée (??) ou plutôt développée à Clamecy, à laquelle les habitants de l’île Margot s’adonnaient avec ardeur. Il est plus vraisemblable, comme le montrent certaines cartes postales, que cette spécialité, dont Paris faisait une grande consommation, occupait les flotteurs en dehors des périodes de flottage.






© 2005 par Annie Delaitre-Rélu
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