Hippolyte Marié-Davy
(1820-1893)
Pionnier de la
prévision du temps
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e délai de réflexion que
l’on s’accorde à Clamecy avant de rendre hommage aux personnalités qui y sont
nées relève presque de la canonisation… Seul Romain Rolland put, à la faveur du
Front Populaire, assister à l’inauguration de plaques concernant sa maison
natale et la rue dans laquelle elle est située.
Hippolyte Marié-Davy n’eut
pas cette chance. S’il reçut peu de temps avant sa mort l’hommage de la ville
de Paris qui lui consacre une rue à proximité de l’observatoire du Parc
Montsouris, la mu
Né en 1820 dans l’échoppe de
son père cordonnier (actuellement une charcuterie), Hippolyte Marié est un
brillant élève du collège de Clamecy, puis du lycée de Moulins, et enfin
boursier au collège Rollin à Paris. A vingt ans, il a ses baccalauréats ès
lettres et ès sciences, et prépare les concours de Polytechnique et de Normale
Sup-sciences. Il est reçu premier à ces deux concours et choisit de rentrer à
Normale Supérieure, ses origines modestes ne lui permettant pas d’intégrer
Polytechnique et d’y faire socialement bonne figure… Sorti premier de sa
promotion à 23 ans, il est nommé professeur au lycée de Saint-Étienne. Un an
plus tard, il devient un brillant agrégé de sciences physiques et
mathématiques, se marie à Clamecy avec Joséphine Davy-Delacheverie. Cette
alliance d’un fils de cordonnier et d’une fille d’un médecin qui s’illustra, il
est vrai, lors de l’épidémie de choléra de 1832, justifie sans doute
l’adjonction du nom de l’épouse à celui de l’époux.
Nommé au lycée de Rouen,
Marié-Davy prépare et obtient son diplôme de Docteur ès sciences physiques.
L’année suivante, à 25 ans, il est nommé avec dispense d’âge professeur à la
Faculté des sciences de Montpellier. Loin d’être chahuté par ses étudiants,
souvent plus âgés que lui, ceux ci l’admirent et respectent ce maître
exceptionnel qui, parallèlement à ses cours, fait sa Médecine. Reçu Docteur, il
cumule les fonctions de professeur à la Faculté des Sciences et professeur à la
Faculté de Médecine de Montpellier, la plus ancienne d’Europe.
Lors du coup d’état du
prince Louis Bonaparte en 1851, l’insurrection de Clamecy oblige le Docteur
Davy-Delacheverie à fuir en exil. Marié-Davy, pour se rapprocher de son
beau-père, sollicite un poste de simple enseignant à Paris au lycée Bonaparte
(aujourd’hui lycée Condorcet), ce qui réduit son prestige et ses émoluments.
Mais pour un scientifique de cette trempe, la notoriété et les avantages
matériels ne pèsent pas lourd face aux devoirs envers
la Famille. C’est de cette époque que datent ses études sur l’électricité au
cours desquelles il invente une pile au bisulfate de mercure qui porte son nom
et fut longtemps utilisée par l’administration des télégraphes français.
Expérimentée pour la première fois par notre corps expéditionnaire lors de la
guerre d’Italie et de la bataille de Solférino (1859), où s’illustra Henri
Dunant, fondateur de la Croix Rouge, cette pile rendit de tels services que
Napoléon III appela l’inventeur à la fin de la guerre et lui demanda quelle
récompense il souhaitait. Le savant répondit simplement : « Sire, je
suis fonctionnaire et, comme tel , mon temps
appartient à l’État. Je n’ai donc rien à lui demander ».
Les
publications de Marié-Davy attirent l’attention. En 1862, il est nommé
astronome à l’observatoire impérial de Paris. Le Verrier, directeur, lui
demande de tirer parti des documents météorologiques qui s ‘accumulent
inutilement, et d’étudier la prévision du temps. En 1866, le service
d’avertissement aux ports est fondé. Cet organisme met en garde quotidiennement
les ports de mer contre les perturbations atmosphériques menaçantes, évitant
aux navires des départs dangereux, et aux pêcheurs des sorties hasardeuses.
Ce
n’est pas une mince besogne de créer de toutes pièces un tel service, sans aide
ni appui officiels auprès des autorités navales, tout en subissant les brimades
stupides du directeur de l’observatoire de Paris, le célèbre Le Verrier. Il
faut créer des stations météorologiques et obtenir des informations rapides à
une époque où la radio et l’aviation n’existent pas. C’est un véritable tour de
force qu’accomplit Marié-Davy. Il établit les bases des grands mouvements de
l’atmosphère, les causes de leurs formations et de leurs déplacements, non pas
avec une certitude absolue, mais avec des approximations approchant de plus en
plus près la réalité, dès cette époque ; une précision que l’instabilité
des éléments ne permet encore pas à l’heure actuelle.
Marié-Davy
est victime de l’ingratitude et des exigences de la politique. Malgré tout,
l’importance de son œuvre s’impose et aboutit à la création de l’Office
National de la Météorologie (O.N.M.) dont on ne lui confie pas la direction…
Mais
en 1872, il est nommé directeur d’un établissement nouveau, mi-national, mi-mu
Marié-Davy
prend sa retraite à Dornecy, près de Clamecy. Il y meurt en 1893 et repose dans
le petit cimetière sous une dalle anonyme, où ne pourraient pas figurer tous
ses titres : Docteur en Médecine, docteur ès sciences physiques et
mathématiques, membre du conseil de la Société des Agriculteurs de France,
membre fondateur de la Société centrale de sauvetage des naufragés, fondateur
et président de la Société française d’Hygiène, membre de la société française
de météorologie, Vice-président de la Société de médecine publique ; en
outre membre correspondant de l’Institut et du Bureau des longitudes, du Sanitary
Institute de Grande-Bretagne, de la Société Royale de médecine publique de
Belgique, etc.
Avant tout, il demeure le modèle caractéristique du savant désintéressé, modeste, loyal, intègre, ayant voué sa vie à son pays et aux siens.