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Le petit flot

 

 

La coupe des bois avait lieu pendant l’hiver, après la chute des feuilles, et devait être finie obligatoirement mi-avril. Les bûches étaient classées d’après leur grosseur au petit bout : bois de moulée = 18 pouces (0,50m) ; bois de taille = au moins 6 pouces de tour (0,15m) ; charbonnette = en dessous de 6 pouces.

 

Au 1er novembre de chaque année, se tenait à Château Chinon, la « Foire aux Bois » où marchands de la ville de Paris comme marchands de l’extérieur, dits « forains » venaient faire leurs achats.

 

Les lots, aussitôt vendus, étaient livrés aux « marteleurs », qui, au moyen d’un « marteau gravé » frappaient chaque bûche à ses deux extrémités de manière à laisser dans le bois, l’empreinte de la « marque » de l’acquéreur portée en relief sur la tête du marteau.

 

Ce martelage était indispensable, car les flots de l’Yonne étaient des « flots de communauté », c'est-à-dire recevant les bois de nombreux marchands et propriétaires ; d’où la nécessité pour chacun de ceux-ci de marquer les bûches avant de les livrer au « flot » afin d’en permettre le tri ou « tricage » sur les ports de réception.

 

Au début, ces signes furent des lettres ; mais leur multiplicité amenait des répétitions et des confusions ; de plus l’emploi de ces lettres était gênant pour les triqueurs et triqueuses pour la plupart illettrés. Ainsi on les remplaça rapidement par des figures d’objets usuels, dont certains ne manquaient pas d’originalité.

 

Une étude sur les marquages de flottage ont été fait par M. Millandre pour de bulletin de la Société Scientifique de 1930. Il a retrouvé et identifié 118 de ces marques appartenant pour la majorité, à des marchands de bois « faiseurs de flottage » : tels :

 

-         le loup de Bossu

-         le chapeau de forme à Renault

-         le maillet de Vincent

-         l’os à deux ailes aux frères Riant

-         le maillet à Boisanté

-         la fourchette à la famille Cagniat

-         la botte à Mouthereau

-         l’ancre à Dampierre

-         la semelle à Henri Riant,etc.

 

La confection des marteaux à marquer fut de tous temps une spécialité de la ville. Plusieurs générations d’artisans fabricants s’y succédèrent et leur production atteignit un tel degré de perfection qu’elle était recherchée dans toutes les régions forestières de France. Les derniers parmi ces artistes de l’acier gravé ont été Pierre-Nicolas Banier ainsi que son élève et successeur, Camille Meunier.

 

 

 

Le marquage des bois en raison de son importance était doté d’une législation très ancienne qui fixait la dimension des marques et leur enregistrement pour éviter les doubles emplois.

 

Les bois martelés étaient empilés parallèlement à la rive : empilage en « rôtie ». Alors que sur les ports de flottage, tels ceux de Clamecy, les piles étaient perpendiculaires au cours d’eau, soit en « éperon ». Ils restaient en place en attendant le « grand flot » ; ils avaient le temps de sécher et avaient ainsi plus de chances de ne pas couler au fond durant la suite du trajet.                  


© 2005 par Annie Delaitre-Rélu
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