Retour à la ville « entre les lacs » après 34 ans d’absence. Le temps manque malheureusement pour aller plus avant dans le massif de la Jungfrau et nous devrons nous contenter cette fois-ci d’une montée à la Heimwehfluh. Ce petit promontoire situé dans la partie occidentale d’Interlaken est aménagé en belvédère touristique depuis 1906, année de la construction d’un funiculaire à voie de 80cm qui a conservé son allure Belle-Epoque :

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De là, vue sur les deux lacs, ici sur Interlaken et le Lac de Brienz :

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Au sommet, à côté de la gare d’arrivée du funiculaire, un véritable fossile vivant : le réseau en « O » de la Heimwehfluh, construit en 1948 et toujours fonctionnel après 63 ans. Typique des réseaux « à grand spectacle » de l’époque, paysages montagneux, circuits à boucles hélicoïdales (on songe à John Allen évidemment mais aussi au premier R.M.A. – « Réseau Miniature Amateur » – de Louis Lavignes Cité du Midi à Paris), il occupe un local de 100m2 abritant 200m de voie.

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L’éphémère et magique revue « Modèles Ferroviaires » lui avait consacré deux pages dans son n°12 de 1952 :

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Le matériel moteur a été depuis quelque peu modernisé pour coller à l’actualité..

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…mais a été réalisé plus dans une optique « fonctionnement intensif » que « Finescale », comme en témoignent les bogies moteurs des locomotives.

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Autre changement par rapport à ma visite en 1977 : le poste de commande, entièrement digitalisé. Souvenir : il y a 30 ans, la régulation était effectuée par circuits de voie (en 1948 : 12 sections de block permettaient la circulation simultanée de 7 trains). L’opérateur – en grand uniforme des SBB-CFF – faisait d’ailleurs la démonstration suivante : en plaçant un wagon isolé sur la voie au premier plan à gauche il arrêtait progressivement toutes les circulations sur le réseau.

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La traditionnelle séquence nocturne qui clôt le spectacle depuis soixante ans :

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Pour redescendre de la Heimwehfluh, trois possibilités : le funiculaire, le sentier et pour les plus téméraires : la luge-monorail. Testée pour vous : séquence émotion garantie ! La poignée au milieu sert de frein, et surtout à s’accrocher 🙂

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La première partie est particulièrement impressionnante, pas le temps d’admirer le panorama :

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Arrivée à la station inférieure, jouxtant le funiculaire :

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Les luges sont garées…

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…dans l’attente d’être remontées automatiquement à la station supérieure par un système de téléphérique :

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Bref passage en gare d’Interlaken-West. Les Re 425 (ex Re 4/4 du BLS) sont fidèles au poste :

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et arrêt obligatoire chez Bühler. Cette boutique de souvenirs suisses en tous genres possède un rayon modélisme ferroviaire très étendu avec une large gamme Bemo et les productions artisanales H-R-F (une entreprise d’Interlaken spécialisée dans la reproduction des trains de montagne et bien évidemment ceux de la Jungfrau – prix de spécialistes…)

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Tout ceci nous amène à l’heure du thé au Grand Hotel Viktoria, sur la Promenade.

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Sous les magnifiques glycines,

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vue sur le massif de la Jungfrau, dans les nuages en cette belle fin d’après-midi :

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Suggestion à la direction du Grand Hotel : faire disparaître les deux misérables blockhaus qui abritent des soi-disant boutiques de luxe, mais qui gâchent la vue depuis la terrasse.

Le funiculaire Territet-Glion vient d’être doté d’une nouvelle halte ultra-moderne : Collonges Funiculaire. La présence d’un arrêt intermédiaire sur un funiculaire n’a en soi rien d’exceptionnel, son voisin, le funiculaire Territe-Mont Fleuri – aujourd’hui abandonné – en possédait deux (dont un un tunnel) en plus des stations extrêmes. Mais ce qui est curieux dans le cadre du Territet-Glion est que cet arrêt a été construit après 125 ans d’exploitation dans un endroit choisi semble t’il plus pour la commodité de réalisation de la station que son potentiel de trafic.

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L’objectif déclaré du syndic étant le désenclavement des hauts de Territet, une remise en service du Territet-Mont Fleuri et de ses deux arrêts intermédiaires en pleine zone construite aurait été certainement plus pertinente (mais plus coûteuse aussi).

Ceci étant dit, la réalisation de ce nouvel arrêt est très soignée :

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Les passagers peuvent prendre leur billet au distributeur automatique et attendre en contemplant le panorama sur le Château de Chillon et les Dents du Midi. Noter que la passerelle métallique plus que centenaire qui relie l’avenue de Collonges au Sentier des Roses a été conservée et rénovée.

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Le site vu côté Sentier des Roses :

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et côté avenue de Collonges :

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Collonges Funi est un arrêt facultatif. L’usager doit appuyer sur le bouton pour arrêter la voiture montante ou descendante :

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L’arrêt d’une voiture du funiculaire T-G à Collonges Funi implique l’arrêt de l’autre voture plus haut dans la pente, les deux voitures étant reliées par un même câble. L’Institut International de Glion ayant délciné l’offre d’installer une deuxième halte symétrique au niveau de ses bâtiments, une simple pancarte en bord de voie indique aux occupants de la voiture supérieure qu’ils se trouvent à un « contre-arrêt » et qu’ils ne doivent pas s’affoler, le funiculaire n’étant pas tombé en panne 😉

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Lausanne : visité la très belle exposition que la Fondation de l’Hermitage a consacré au modernisme espagnol :

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A l’opposé des grands shows parisiens du Grand Palais ou de Beaubourg, l’Hermitage – limité par sa superficie réduite – propose des expositions plus modestes, mais toujours originales, pertinentes et très documentées. C’est d’ailleurs à l’Hermitage que fit halte le road-show de Christo et Jeanne-Claude « Over the River« , pour le financement de leur projet de couverture temporaire de la rivière Arkansas dans le Colorado. L’année suivante, ce fut une rétrospective du peintre américain Edward Hopper – bien connu des FDEM et des visiteurs d’Expométrique – qui connut un succès phénoménal.

Tradition oblige, après l’Hermitage, direction le Chalet Suisse accessible par un sentier pentu pour la traditionnelle fondue post-exposition.

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Et là, surprise. Les jaridiniers de la ville ont procédé à un élagage massif des arbustes qui poussaient sur la zone au pied du restaurant, révélant des vestiges du terminus du funiculaire de Sauvabelin :

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Vestiges qui se résument à la partie supérieure du portail du tunnel qui donnait accès à la station supérieure; tunnel aujourd’hui comblé sur une partie de sa longueur :

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La clé de voûte porte l’année de construction de l’ouvrage (1899) :

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Le funiculaire de Sauvabelin fut inauguré le 18 octobre 1899. La ligne à voie métrique reliait la place du Vallon (alt. 456m) au Signal de Sauvabelin (alt. 564m), passant successivement sur un viaduc et dans un tunnel de 135m. Victime de la concurrence routière dès les années 1920, l’entreprise ne fut pas un succès financier. Nécessitant d’importantes réparations, l’exploitation du funiculaire fut interrompue le 31 octobre 1948. La ligne fut démolie l’année suivante. Seuls subsistent la station inférieure et le tunnel, partiellement comblé comme on l’a dit.

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Station inférieure, place du Vallon.

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La station inférieure convertie en entrepôt. Etat août 2010.

Dans les noires forêts entre Glion et Montreux se dissimule une discrète résidence qui s’est dotée d’un moyen de transport échappant à la taxonomie ferroviaire courante :

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Difficile en effet de classer cet équipement : monorail, funiculaire (noter la présence de poulies), ascenseur oblique ? Ou plus simplement : « transport hectométrique », terme consacré par les légendaires « Transport Expo » des années 1970 à Villepinte 😉

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La station inférieure, située au niveau d’un parking, comporte un petit abri protégeant les boîtes aux lettres des résidents.

Le flâneur du Quai des fleurs à Montreux peut facilement négliger l’imposante ancre de marine exposée face aux Dents du Midi. Quoi de plus normal sur les rives de cette marina, à deux pas de la station de sauvetage ?

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Le promeneur attentif, lui, ne manquera pas de lire le petit cartel sur le socle précisant qu’il s’agit d’une ancre d’amarrage qui servait jadis au mouillage des hydravions assurant la liaison Southampton-Montreux. Deux villes qui ont une grande importance pour l’auteur de ce blog, à la fois aficionado du MOB et visiteur régulier de Southampton, un temps membre du Solent Model Railway Group dont il géra pendant 11 ans sa « fenêtre sur Web« . Chose curieuse, en 42 ans de visites à Montreux, je n’avais jamais trouvé de photo de l’hydravion assurant la liaison avec les rives du Solent. C’est enfin chose faite avec cette vue de l’appareil dans la baie de Territet :

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Après enquête, il s’agissait d’un Short Solent, hydravion de 49 places, exploité par Aquila Airways. Fondée en 1948 par Barry Aikman, cette compagnie aérienne exploitait une flotte d’hydravions Short (Sandringham et Solent) depuis le Berth 50 à Southampton à destination de la Cornouaille, Lisbonne, Madère. Elle participa également au pont aérien de Berlin. La ligne Southampton-Montreux semble n’avoir fonctionné qu’en 1957, Aquila Airways ayant cessé ses opérations l’année suivante.

Retour au dépôt pour la 040 Mecklenburg après une longue journée de traction au Swiss Vapeur Parc. Gestes séculaires de la vapeur.

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Traditionnel voyage de printemps au pays du MOB, entre Montreux et Zweisimmen. C’est l’occasion de découvrir les nouvelles tendances des ateliers de Chernex 🙂

Trois axes majeurs :
– l’accessibilité, avec les nouvelles voitures à plancher surbaissé :

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(Bs223 à Montreux, 22.04.2011)

l’écartement variable du Transgoldenpass (façon Talgo) pour un éventuel prolongement des dessertes de Zweisimmen à Spiez sur la ligne à voie normale du BLS. La pose d’un troisième rail sur la section Zweisimmen-Interlaken Ost ayant été abandonnée pour des raisons obscures – c’est peut être la raison de la présence du gigantesque point d’interrogation sur la porte d’accès ;-))

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(BDs 220 à Gstaad, 20.04.2011)

– l’extension progressive de la nouvelle livrée or et blanche, en remplacement de la tradtionnelle livrée bleue et blanche (des redécorations qui vont faire la fortune de BEMO !) :

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(BD204 à Montreux, 17.04.2011)

Etendue également aux autres lignes du groupe comme le funiculaire Territet-Glion :

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(Collonges sur Montreux, 14.04.2011)

Et à la crémaillère Montreux-Glion-Naye :

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(Bhe 4/8 305 à Montreux, 18.04.2011)

Carl Arendt nous a quittés le 4 mars dernier. Celui qui se présentait comme un « gourou en retraite » avait développé dès 1966 une approche originale et sympathique du modélisme ferroviaire : le micro-réseau.

Carl Arendt (Photo DR)

Là où les modélistes ferroviaires « sérieux », en bons disciples de John Allen, ne jurent que par le réseau de grandes dimensions occupant toute une pièce, oeuvre d’une vie, parfois commencé mais jamais terminé tant les aléas de l’existence sont nombreux (travail, déménagements, lassitude, divorce, maladie, mort), Carl Arendt proposait une autre voie : le « small is beautiful ». Un réseau sur quelques décimètres carrés, rapide à construire, exploitable et surtout logeable dans le plus petit des appartements. Son coup de maître restant son « Squarefoot Estate Railway », un réseau à l’échelle Gn15 (1/24e sur voie HO de 16,5mm) qui occupe comme son nom l’indique une surface de 1 pied carré.

En bon ingénieur qu’il était (Carl Arendt était diplômé de la prestigieuse Université américaine de Carnegie-Mellon et avait fait toute sa carrière professionnelle chez Westinghouse Electric), il aborda la question du micro-réseau de manière systématique à travers une classification qui portera peut-être un jour, espérons-le, le nom de son auteur : la « Classification Arendt ». Les principaux critères en étant : le nombre d’aiguillages, le nombre de niveaux, si le réseau est bouclé ou non, avec ou sans rebroussements, plaque tournante, etc.

Carl Arendt a notamment contribué à ressusciter un système inventé en 1926 par le modéliste britannique A.R. Walkley et repris comme shunting puzzle par Alan Wright en 1980 : l’Inglenook.

Cet important travail théorique a connu une audience mondiale grâce à son site Web « Micro-Layouts you can build », créé en 1999 et constamment enrichi par des contributions provenant de modélistes du monde entier, et trois livres. Carl était aussi un visiteur régulier des pages Expométrique de mon site Web, passionné par les micro-réseaux réalisés dans le cadre du Défi GEMME-Voie Libre, où il retrouvait un esprit qu’il avait fait sien.

« Martens & Co. ». Un réseau dans une boite à chaussures par Chris Krupa.
Vu à Expométrique 2003.

A l’heure où les forums de modélisme ferroviaire sont envahis par tous les grincheux, aigris, ratés, sociopathes narcissiques et « Pères la virgule » orchydoclastes de la Création, le site de Carl Arendt est une oasis de créativité, d’inspiration, de bonne humeur, de vraie liberté qu’il faut visiter de toute urgence tant qu’il est encore accessible : www.carendt.us.

We miss you Carl.

Tous les ouvrages consacrés à l’histoire des chemins de fer suisses commencent plus ou moins, et pour cause, par : « la première ligne de chemin de fer en suisse fut inaugurée le 7 août 1847, elle reliait Zürich à Baden et portait le nom de Spanischbrötlibahn, ou ligne des petits pains espagnols ». Malheureusement, craignant probablement le hors sujet, les historiens ferroviaires omettent généralement d’indiquer ce que sont ces fameux « Spanischbrötli ».

Baden 1847

Baden SBB 2011

Les « petits pains espagnols » sont une spécialité patissière de Baden, Argovie, hautement appréciée par la bonne société Zürichoise du 18e siècle. A l’époque, c’est une pâte feuilletée de forme carrée de 9x9cm que l’on déguste sortie du four. L’anecdote rapporte que les notables de la ville de Zwingli n’hésitaient pas – en ces temps de réglementation du travail inexistante – à envoyer leurs domestiques accomplir de nuit l’aller-retour Zürich-Baden (50km quand même) pour avoir le privilège de déguster les petits pains Badenois frais au petit-déjeûner. De ce point de vue, le chemin de fer constitua une amélioration indéniable des conditions de vie de la domesticité.

Mais la ville de Baden, plus préoccupée par ses eaux sulfureuses et son industrie électromécanique, négligea la spécialité qui fit sa renommée. Les petits pains espagnols tombèrent dans l’oubli. Et il faut attendre 2007 pour que plusieurs boulangers de la ville relancent le Spanischbrötli sous une forme modernisée avec un fourrage constitué de carotte et noisette.

Cette renaissance reste cependant discrète : mes collègues de Baden ignoraient leur existence, ou peut-être s’agissait t’il d’un secret à ne pas partager avec un ausländer :-). Après quelques recherches sur Internet et dans la vieille ville, c’est finalement chez Moser’s sur la Schlossbergplatz, au pied de la tour de l’horloge, que je fis affaire :

Pour 3,70 CHF, j’ai pu déguster la version sucrée : carotte + noisette saupoudrée de sucre glace, aux dimensions canoniques de 90 x 90mm :

Le voile s’était enfin levé sur un pan de l’histoire ferroviaire de la Suisse…

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